
J’ai tout d’abord voulu intituler ce billet: « Dieu existe ». Mais tout le monde le sait déjà et encore, personne n’aurait saisi tout d’un coup le sens de ma pensée. Le Cameroun a plein de problèmes. Et l’un de ses problèmes est l’actuel capitaine de son équipe nationale masculine A, j’ai nommé Samuel Eto’o fils. Le pénalty qu’il a bazardé samedi n’est que la goutte qui a fait déborder le vase de la patience des camerounais maintes fois mise à l’épreuve par les écarts de conduite de celui n’est rien de moins que le joueur de football camerounais le plus prolifique de l’histoire de ce jeu. Six raisons pour lesquelles il doit partir de l’équipe nationale.
1- Tout simplement parce qu’avant, il n’était pas là! Et on s’est bien débrouillés sans lui. Il n’était pas là en 1982 quand le Cameroun a participé à sa première coupe du monde et s’en est sorti plus qu’honorablement, invaincue (trois matchs nuls contre la Pologne, l’Italie et le Pérou). Il n’était pas là quand on a remporté la CAN en 1982 et en 1986. Il n’était pas là lors de l’épopée de 1990. Donc, on peut faire sans lui. Et puis, 14 ans de présence au sein des Lions Indomptables, c’est amplement suffisant pour qui n’est pas boulimique.
2-Parce qu’il n’est pas le seul à qui son argent monte à la tête: je ne fais pas partie des personnes aigries qui jalousent ses millions d’euros, mais la fortune du jeune homme pose un réel problème à cette équipe. J’ajouterai à cela l’aura qui l’entoure partout où il va. La conséquence est qu’il ne peut être sanctionné en équipe nationale quand il commet ses méfaits. Et Dieu sait qu’il en commet. La classe dirigeante de la Fédération camerounaise de football ferme les yeux sur tout ce qu’il fait (effrayés qu’ils sont peut-être ou les paupières alourdies par l’argent, je ne sais pas). Les entraîneurs arrivent timorés devant lui. Ses coéquipiers en équipe nationale ne sont pas toujours aptes à se départir de son influence. Et pour ceux qui s’y essaient, c’est le bannissement qui les guette (Alexandre Song, Achille Emana, Carlos Kameni en savent quelque chose).
3- Parce qu’il a montré ses limites en tant que capitaine. Sinon, comment expliquer que Rigobert Song, qui a fait 10 ans de capitanat sans qu’on entende jamais parler de lui, ait cédé sa place à un Eto’o qui en seulement deux ans a littéralement fait exploser l’équipe? La seule hypothèse plausible est que ce Samuel n’est pas un meneur d’hommes. Quelques arguments: on se souvient de cet épisode surréaliste au Stade Ahmadou Ahidjo de Yaoundé. Pendant que l’équipe et le staff se traînent jusque là dans un bus, lui il arrive dans sa voiture, un Hummer H2 et en retard! L’an dernier, après le match contre la République Démocratique du Congo, quand ses coéquipiers camerounais rentrent dans la soute de l’avion cargo militaire qui allait les ramener à Yaoundé, que fait le capitaine? Il se dirige en compagnie de deux joueurs congolais vers un jet privé qui l’attendait là. A-t-on jamais vu un capitaine abandonner ainsi ses troupes ? La semaine dernière, sous le prétexte que l’un des joueurs a refusé de prendre sa main, Eto’o s’est mis en colère et a purement et simplement boycotté la séance d’entrainement prévue pour ce jour là! Eto’o restera à jamais comme le premier capitaine sous lequel une participation à la coupe du monde s’est soldée par un zéro tout rond. Même aux pires heures du football camerounais, on s’arrangeait quand même à ne pas boire ainsi le calice jusqu’à la lie.
4- Parce qu’il n’est pas un modèle maîtrise de soi. J’ajouterai qu’il n’est pas tant que ça un exemple pour les jeunes. Il a défrayé la chronique en 2008 quand il a violemment asséné un coup de tête à un journaliste lors d’une conférence de presse. En Europe, on connaît le Eto’o qui adresse des gentillesses aux garçonnets Blancs qui admiraient sa cylindrée à Paris. Ici, on retient le Eto’o qui a giflé un enfant à Yaoundé qui avait osé s’adosser à sa voiture; le Eto’o qui avait claqué un autre bambin qui avait commis l’erreur de crier en sa présence: « Eto’o, mouilleur! Eto’o, mouilleur! » (au Cameroun, on qualifie quelqu’un de « mouilleur » quand on estime qu’il ne sait pas jouer au foot). Tout dernièrement, il a proféré des menaces inacceptables à l’encontre d’un journaliste lors d’une conférence de presse à Dakar en lui assurant entre autres qu’il irait « voir son patron », car un malotru pareil « ne mérite pas de travailler pour cette merveilleuse chaîne » (de télé camerounaise, sic).
5- Parce qu’il met l’équipe nationale sens dessus dessous. D’abord, il ne respecte pas ses coéquipiers (voir les exemples mentionnés plus haut), ensuite, c’est le staff technique qu’il dédaigne. Samedi, au cours du match contre le Sénégal à Yaoundé, tout le monde l’a vu retenir sur le terrain un joueur que le coach avait décidé de remplacer! Roger Milla (un autre fauteur de trouble devant l’Éternel) avouait que pour la CAN 2008 qui avait eu lieu au Ghana, c’est lui et les cadres (dont faisait partie Eto’o) de l’équipe qui sélectionnaient les joueurs qui devaient commencer les matchs, alors que le même Roger Milla ne faisait pas partie de l’encadrement proche de l’équipe. En Afrique du Sud, il a été l’un des principaux responsables de l’ambiance détestable qui a prévalu au sein de l’équipe et j’étais partisan de la nécessité qu’il y avait à l’éjecter de cette équipe dès le retour d’Afrique du Sud.
6- Parce qu’avant toute chose, Dieu existe. Octobre 2005: Pierre Womé Nlend manque à Yaoundé le pénalty qui aurait propulsé le Cameroun à la coupe du monde Allemagne 2006. Eto’o, au lieu de se taire comme tous les autres joueurs, se répand en affirmant qu’il voulait tirer ce pénalty, ce a quoi Womé se serait opposé. Dieu, l’a entendu. Rebelote un scénario identique avant-hier 04 juin 2011. Même circonstances, même stade, même filets. Eto’o tire et se manque. Et après, il vient nous demander pardon. Eto’o, on t’accorde le pardon. Mais tu seras totalement absous si tu quittes cette équipe dès aujourd’hui. On en a déjà assez bavé comme ça. On est reconnaissant pour tout ce que tu nous as apporté Eto’o Fils, mais pense à cette équipe que tu aimes tant. Tu seras là qu’il n’y aura jamais de paix en son sein.
Il faut toutefois signaler que Eto’o n’est pas le seul fautif de la bouillabaisse dans laquelle se trouve l’équipe nationale du Cameroun de football. Il doit tout de même partir, mais en emmenant avec lui l’ensemble de tous ceux qui gèrent le football au Cameroun. En commençant par le ministre des sports, qui à mon avis, a mieux à faire que d’aller lui-même séparer deux joueurs qui se chamaillent. En passant par le staff de la fédération camerounaise de football qui s’est montré incapable à tous les niveaux. Incapable de gérer cette équipe. Incapable de se faire respecter des joueurs. Incapable de tout. Ils devraient tous déposer leur démission. Mais ils ne le feront pas, car un dicton bien de chez nous dit « la honte ne tue pas le camerounais ».
Par René Jackson
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